Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte

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Rapport final sur les bases d’appui zapatistes affectées par l’ouragan « Stan »

Des compañeras et des compañeros présent(e)s au Chiapas

jeudi 3 novembre 2005

Rapport final sur les bases d’appui zapatistes affectées par l’ouragan « Stan » dans les zones Sierra et Costa, Commune autonome Tierra y Libertad, Caracol de La Realidad

Aux collectifs de solidarité en Europe et dans le monde,
Aux personnes concernées,

Tandis que l’attention des médias et les aides de l’État mexicain se concentrent maintenant sur l’ouragan « Wilma », les effets dévastateurs de l’ouragan « Stan » se font encore sentir. Début octobre, ce dernier avait ravagé plusieurs États mexicains, détruisant tout ce qu’il rencontrait sur son passage. « Nous n’avons jamais rien vu de tel de toute notre vie », déclarent les habitants des régions touchées, des gens pauvres et humbles pour la plupart.

Au sud du Chiapas, près de la frontière avec le Guatemala, des villages ont été rayés de la carte à la campagne, dans la montagne et sur la côte, tandis que dans certaines villes certaines colonias (des cités pauvres) ont entièrement disparu. De nombreuses bases d’appui zapatistes, dont beaucoup de personnes non indigènes, hommes et femmes, y habitent, y travaillent et y luttent.

Quatre ou cinq jours durant, les eaux et la terre, la boue, les troncs arrachés et les décombres que l’ouragan charriait ont ravagé les maisons, laissant les familles sans rien, ensevelissant tous leurs biens, dévastant champs et plantations. Les bases d’appui zapatistes ont été durement affectées. La commune Che Guevara, une commune autonome zapatiste de la zone Sierra, a totalement disparu, et avec elle le centre autonome de formation des promoteurs d’éducation et de santé de la région, qui n’était entré en fonctionnement que depuis trois mois. Les zapatistes, les compas, comme eux-mêmes se désignent, ont perdu leurs maisons, leurs plantations de maïs et de café, la terre cultivable elle-même et tout ce qu’ils possédaient. Il faut aujourd’hui obtenir des terres pour qu’ils puissent tout reconstruire, leur vie.

La moitié du village de Toquián, perché auparavant sur la crête de la montagne, a été emporté, le terrain s’étant effondré. Les maisons ont été ensevelies ou ont glissé de plusieurs mètres quand la montagne a commencé à s’effondrer sous l’effet des pluies torrentielles. Les plantations de café et de maïs ont été totalement détruites, la récolte étant définitivement perdue. Des familles zapatistes ont dû abandonner les lieux, tandis que d’autres sont restées et occupent encore leurs maisons, courant le risque que le terrain, complètement détrempé, cède à nouveau. Le sol tout entier est menacé, il n’y a donc pas moyen d’en cultiver une parcelle ou d’y reconstruire sa maison.

À Motozintla, dans la même zone, la situation n’est pas différente. La ville est à moitié détruite, plusieurs maisons des compas ont été perdues, mais le plus grave est l’air, devenu difficilement respirable. Beaucoup de gens portent des masques, à cause de la poussière qui englobe en permanence la ville.

Dans la ville de Huixtla, dans la zone de la côte, des colonias entières ont été ensevelies, d’autres ont été emportées. Les bases d’appui zapatistes qui y habitaient ont perdu leur maison, sans compter les triporteurs avec lesquels ils gagnaient leur pain en faisant le taxi et en pratiquant la vente ambulante. À Tapachula également, plusieurs maisons ont été affectées et beaucoup de gens ont perdu presque tous leurs biens. L’école autonome locale est aujourd’hui enterrée sous la boue. On ignore l’ampleur exacte de la catastrophe, de nombreux zapatistes restant isolés, sans que l’on ne sache rien d’eux. Ailleurs, les pêcheurs bases d’appui zapatistes de Puerto Madero et d’El Arenal ne peuvent plus pêcher. À El Arenal, notamment, ils ont perdu leurs maisons et leurs barques et leurs réserves d’eau sont contaminées. De plus, la vie de leurs enfants court un danger à cause des maladies, du fait des eaux stagnantes laissées par l’ouragan et de la chaleur étouffante qui caractérise le climat de la région, qui favorisent l’apparition de la dengue et du choléra.

Un mois après le passage de l’ouragan, la situation est grave et les besoins urgents pour toute la population. L’aide apportée par le gouvernement aux populations pauvres est infime, de quoi manger pour une journée et guère plus, c’est-à-dire rien, pour des hommes et des femmes, des familles entières qui ont tout perdu. Les bases d’appui, comme toujours, ne demandent rien au gouvernement mexicain et n’acceptent de lui aucune aide. Ils s’organisent entre eux, s’aidant mutuellement, et survivent de cette manière. Les premières aides rassemblées par le Conseil de bon gouvernement de La Realidad (aliments, vêtements et médicaments pour couvrir les besoins de base les plus urgents) sont arrivées aussi vite que possible et continuent d’y être acheminées avec le soutien des communautés et de la société civile. Les zapatistes affectés continuent, avec volonté et force. Leur confiance dans la lutte et la solidarité de leurs compañeros alimente leur volonté de vivre, autrement dit de poursuivre la lutte, pour reconstruire leur vie, pour renforcer leur autonomie, en repartant à nouveau de zéro... Dans cette nouvelle étape, ils ne doivent pas seulement reconstruire leurs maisons, mais aussi leurs moyens de production et de subsistance, afin de ne pas rester dans le besoin. Il est important que le soutien de l’étranger et la solidarité internationale tiennent compte de cette réalité.

Des compas de plusieurs pays, présents au Chiapas.
Le 3 novembre 2005.

Pour envoyer votre soutien, prenez contact avec les collectifs de solidarité avec les zapatistes.

Traduit par Angel Caído.